Enfin de retour sur la route après une semaine à jouer à la touriste en ville. Maintenant, que la vraie aventure commence dans les montagnes!
Jour 29 (2 novembre) = Chengdu à Qionglai (89,6km)
Un déjeuner rapide et je quitte mon hôte. Je suis 100% en contrôle dans ma sortie de la ville, même pas un petit détour! Championne que je suis!
Je roule un peu avec un autre cycliste chinois qui porte des jeans et un manteau de cuir et qui va à Xinjin, une ville à environ 50km de Chengdu.

Mes jambes sont fatiguées d’avoir trop marché les derniers jours, mais le parcours est encore plat avec toutefois un vent de face un peu tenace. Je dine dans un petit resto en bordure de la route, un bon bol de nouilles épicées, j’ai bien fait de dire à la fille d’y aller mollo sur les piments forts, comme ça j’ai pu tout manger sans me brûler la langue!
En reprenant la route, je croise un autre cycliste chinois et cette fois, lui aussi était chargé et j’ai lancé un joyeux Nihao, mais j’ai seulement eu droit à un drôle de regard en retour. Eh bien! Je pensais que l’on formait une grande communauté les cyclistes… Il roulait peut-être 0,5km/h de plus vite que moi, alors je l’avais toujours en ligne de mire pendant 20km. Un peu frustrant!
En arrivant à Qionglai, j’ai fait un rapide tour de ville pour trouver un hôtel et je ne voyais rien avant de revenir sur mes pas et d’en trouver un. Il était un peu trop cher pour moi, même en négociant, j’avais réussi à faire passer le prix de 150 rmb à 100 rmb. Il faut toujours négocier! Je me limite à environ 80 rmb/nuit (souvent j’arrive à trouver moins cher), alors juste en face par chance il y en avait un autre et cette fois c’était bon!
Parfois, il faut faire des compromis et ça sent l’odeur de cigarette des vieux motels, mais bon l’air frais des montagnes m’attend très bientôt et va me purifier les poumons. Comme je suis arrivée tôt, c’était l’objectif, j’ai pu relaxer un peu avant d’aller me promener dans la ville.
Dans la rue derrière mon hôtel, il y a plein de petits restos et marchands de fruits. Je me prends une petite collation un flat bread aux tomates et sésame, une valeur sûre que j’adore! Je suis allée marcher un peu dans Linqiong Ancient Town, toutes les anciennes villes finissent par se ressembler avec boutiques et kiosques à nourriture sans parler du bruit pour attirer les clients.
Fait particulier à Qionglai, c’est la ville jusqu’à maintenant ou j’ai vu le plus de petits taxis, de style carrosses, ils sont partout! Je suis allée acheter mon déjeuner du lendemain au supermarché avant de partir à la quête d’un petit resto, le choix ne manquait pas, mais aucun n’a d’images pour m’aider. Finalement, j’opte pour un qui m’a l’air sympathique et je réussi à me commander un riz frit. Je passe le reste de ma soirée tranquille dans ma chambre.
Note à part : Je ne sais pas si vous avez remarqué, il n’y a jamais de lettre u qui suit la lettre q! Ça me mélange à chaque fois!
Jour 30 (3 novembre) = Qionglai à Ya’an (82,2km)
Altitude 650m
Ascension totale 679m
Je me réveille plus tôt que j’aurais voulu et je suis incapable de me rendormir. Je prends donc mon temps et je déjeune au lit avec du pain brun (une première) et du pain chinois. Je me rends compte qu’une souris est venue manger la nuit dernière déchirant aussi mon petit sac pour mes excursions en ville. Je ne remarque pas d’autres dommages.
J’étais à une intersection de la G108, route que je vais emprunter toute la journée, alors ça été très facile de quitter la ville. Moi qui croyais que ce serait encore tout plat aujourd’hui, j’ai eu une surprise en voyant une première montée après 3km. Les jambes sont ok, c’est plutôt le moral qui est en cause. Un petit coup de blues que j’attribue notamment aux photos de ski que je vois sur les médias sociaux et aussi à l’angoisse de l’inconnu des montagnes et de la haute altitude.
Bref, les 35 premiers km ont été longs et ça me tentait de prendre des pauses à toutes les cinq minutes. J’ai dû jongler avec mes vêtements, car la température était dans l’entre deux. Le décor était beau, la route un peu moins avec plusieurs travaux et relativement beaucoup de circulation au fur et à mesure que je traversais différents villages. Dans ce coin de pays, les gens font brûler les déchets dans des conteneurs de métal en bordure de la route.
La deuxième moitié de ma journée s’est mieux déroulée avec encore quelques petites montées et une longue descente vers Mingshan, une dernière courte montée avant de franchir un petit tunnel et de descendre sur Ya’an. C’est beau avec les montagnes qui encerclent la ville.
À ma droite je vois le West Sichuan Ladder qui fait partie du Jinfeng Park et ses quelques 700 marches très pentues. Au début, je voulais seulement prendre une photo et poursuivre ma route, mais finalement j’avais du temps en masse et assez d’énergie pour gravir les escaliers et profiter de la superbe vue. Mes jambes tremblaient quand je suis retournée à mon vélo et mes mollets étaient tendus, mais ça a valu la peine!
Il y avait une ou deux vitesses qui sautaient sur mon vélo et je voulais aller dans un magasin de vélo pour régler le problème. Je traverse l’artère principale de la ville sur toute sa longueur sans voir de magasin, mais je remarque un hôtel potentiel, je décide d’aller voir et en même temps de m’informer pour un magasin de vélo.
La traditionnelle négociation et je visite la chambre et c’est ok, mais avant je veux aller voir pour mon vélo. La fille à l’accueil me dit de la suivre elle va me guider. Finalement, elle m’amène chez un petit monsieur au coin de la rue qui répare sur le fly les vélos, oups je cherche mes mots pour dire que je veux un gros magasin de vélo, pas question qu’il bricole sur mon vélo celui-là!
Je trouve finalement un magasin Giant, le monsieur teste l’usure de ma chaine, il la lubrifie et joue un peu avec les vitesses sans rien trouver. Selon moi, c’est ma cassette qui est usée, car c’est les vitesses que j’utilise le plus fréquemment. C’est juste un peu désagréable et je vais essayer d’y remédier dans la prochaine ville d’une certaine importance que je vais croiser.
Pour je ne sais quelle raison, il y a beaucoup de présence policière dans la ville. Je soupe dans un petit resto, les gens me donnent le menu en chinois comme si je savais lire… Finalement, j’avais amené une feuille avec des images et la description de menus que j’avais imprimé du site ‘’How to order chinese food’’ et j’ai eu droit à un excellent repas de porc et piments verts avec riz.
Jour 31 (4 novembre) = Ya’an à Lianglu village (88,1km)
Altitude 1455m
Ascension totale 1375m
J’ai eu une excellente nuit de sommeil, mais je me réveille avec l’estomac noué et je n’ai pas vraiment faim, ce qui ne me ressemble pas. J’avale quand même un gros bol de gruau avec bananes pour avoir un fond.
À partir de maintenant et pour les prochains jours, je vais suivre la G318, alors il n’y a pas trop de danger de me perdre, car il y a une seule route et avec parfois une intersection!
La sortie de Ya’an m’a obligée à être très alerte avec une lourde circulation majoritairement de camions et les 15 premiers km ont été relativement stressants avant qu’il y ait un embranchement et que ça devienne un peu plus tranquille.
La route est relativement étroite et mouillée, même s’il ne pleuvait pas. Il y a beaucoup de cratères, de trous, de bosses, de roches, ce qui nécessite une constante attention pour ne pas passer par dessus le guidon ou perdre mes sacoches.
Ça monte et ça descend, jamais plus d’un kilomètre à la fois. Ce n’est jamais plat, ma vitesse est réduite, mais ça ne me dérange pas. J’adopte la stratégie du petit train va loin. J’essaie de ne pas prendre trop de pauses et je me donne de petits objectifs de 15-20km à franchir.
Rendue au km 35, je passe dans la ville de Tianquan et je m’arrête à un petit kiosque pour acheter des fruits. La dame est très impressionnée que je roule toute seule! Je continue ma route et décide de prendre une première longue pause à mi-chemin de ma journée vers le km 45. Les jambes sont toujours bonnes, le moral aussi.
Il y a plusieurs glissement de terrain sur la route et à certains moments, je roule à la même vitesse que les gros camions qui m’encouragent et me laissent assez d’espace pour éviter les gros trous.
Pratiquement toute la journée, je longe une rivière ou ils sont en train de construire une centrale hydroélectrique, alors le décor est complètement en train de changer. La route est logée entre deux chaines de montagnes et on se sent vraiment petit. La météo était humide et j’avais trop chaud en montant et un peu froid en descendant.
J’ai du traverser un tunnel assez court, mais très noir entre le km 2705 et 2706, je n’ai pas le choix de marcher en m’éclairant, car ce n’était pas asphalté et il y a de grosses roches.
Les huit derniers kilomètres ont été pénibles, je commençais à me sentir mal et la qualité de l’asphalte s’est dégradée. Je me faisais secouée en essayant de naviguer entre les trous autant en montée qu’en descente. Je roulais à moins de 10km/h. J’avais quand même ce petit sourire faible sur le visage! Je faisais le décompte des kilomètres, en pensant à mes journées planting de cet été et à mon expérience au Marathon canadien de ski de l’an dernier.
Finalement, j’ai commencé à voir des guesthouses de chaque côté de la route et il y avait une file d’au moins 1km de véhicules arrêtés pour je ne sais quelle raison, j’ai continué à monter jusqu’à temps que ma tête commence à tourner et que je décide de conclure ma journée ici. Après tout, j’étais rendue dans le village ou j’avais prévu m’arrêter, même si je pense que le coeur du village est un peu plus haut sur la route. Je m’informe à des gens dehors ou je peux dormir et manger et je suis chanceuse, la maison ou je me suis arrêtée est aussi un guesthouse même si ça ne paraît pas.
C’est une maison très modeste et je suis surprise qu’il y ait l’électricité en fait il y a même une grosse télévision!
Les clients dehors, qui m’avaient aidée, voulaient prendre une photo avec moi et me parler, mais je suis étourdie et je veux juste m’asseoir. Je ne veux pas être impolie, mais je ne me sens vraiment pas bien. Finalement je leur dis que je dois me reposer un peu avant le souper. Je vais m’étendre sur mon lit en espérant que ça passe.
Environ une heure plus tard, je descends à la cuisine pour une première tentative de souper. C’est impossible, j’ai de la difficulté à tenir debout et après cinq minutes je retourne dans mon lit. Dommage, car il y avait un gars qui parlait un peu anglais.
Ma deuxième tentative est un peu mieux et la dame me prépare un super souper épicé. Je mange un peu avant de me sentir trop mal. Je retraite dans ma chambre après leur avoir expliqué (pensez toujours à la barrière de la langue) que j’étais malade, mais que la nourriture était excellente. La dame vient me porter une deuxième couverture et un autre oreiller tout en s’assurant que je vais bien.
Je me couche en entendant mon ventre gargouiller. De fréquentes visites à la toilette et une tentative de prendre des médicaments, mais impossible avec seulement de l’eau bouillante, je me brûle la langue avant de décider d’attendre que l’eau devienne plus froide.
Je m’endors rapidement et espère que le sommeil va tout arranger.
Jour 32 (5 novembre) = Lianglu village
Journée de repos forcée à cause d’une diarrhée persistante et d’un manque d’énergie. Ma nuit n’a pas été de tout repos avec beaucoup d’aller-retour entre ma chambre et la toilette squat qui se trouvait à être quand même assez loin avec à chaque fois un petit escalier pentu à franchir.
Avant mon départ, j’avais pris toutes les précautions nécessaires pour pouvoir agir en cas de diarrhée du voyageur. Notamment, avec le vaccin, des antibiotiques et, si cela persiste plus de 48h, des Immodiums et une solution de réhydratation Gastrolyte.
J’ai donc pris de l’Immodium et du Gastrolyte pour m’aider à reprendre des forces et revenir « moi » le plus rapidement possible. Je ne suis pratiquement jamais malade et à chaque fois je déteste me sentir si vulnérable.
Comme je reste dans un guesthouse avec une famille, j’ai eu droit à un bon déjeuner, une soupe avec nouilles, tomates et oeufs qui, selon la dame, allait m’aider à guérir! Les gens sont super gentils, ils vivent dans une grande maison modeste, mais ils ont un grand coeur. Grâce aux signes, hier soir, j’ai fait comprendre que je me sentais malade et que j’avais mal au ventre. La dame et son mari ont été aux petits oignons avec moi.
Mon énergie revient peu à peu et les visites à la toilette s’espacent ce qui est bon signe. J’en profite pour reprendre mon retard sur l’écriture du blog dans le salon en regardant les nouvelles et un soap chinois! Quelques clients viennent me voir et on échange pendant quelques instants par signes.
J’ai eu droit à un bon diner et la dame insiste pour toujours me donner plus à manger, mais je fais attention, car j’ai encore l’estomac un peu sensible. Ensuite, j’ai pris une mini-marche pour aller voir ce qu’il y avait un peu plus haut dans le village. J’ai profité d’une partie de mon après-midi pour faire une sieste en écoutant de la musique afin de rattraper les heures de sommeil perdues.
C’est très humide dans la maison et plutôt froid, mais sous mes couvertures je suis bien. Je crains seulement le moment de remettre mon linge de vélo humide demain matin.
Deux petits gars qui me regardaient jouer à 2048 en attendant que le souper soit prêt, ils avaient l’air très intrigués, mais un peu peureux en même temps. J’ai eu droit à un bon repas avec le meilleur bacon que je n’aie jamais mangé, accompagné de légumes et de riz blanc. Je suis ensuite allée me reposer/réchauffer afin de maximiser ma récupération.
Jour 33 (6 novembre) = Lianglu village
Je me suis réveillée en sueur vers 5h je pense, j’ai enlevé mon manteau et je me suis rendormie pour me faire réveiller, environ 1h plus tard, par le bruit des camions qui passaient sur la route en bas de ma chambre. Les maux de ventre ont recommencé et les visites à la toilette aussi. Retour à la case départ. Impossible de prendre la route encore aujourd’hui dans mon état, pourtant tout allait ok quand je me suis couchée.
Vers 10h, la dame de la maison où je reste est venue me chercher et elle a insisté pour m’amener à l’hôpital/clinique du village. J’ai vu un médecin et il m’a donné des médicaments, une solution de réhydratation et d’autres pilules inconnues… La dame m’a fait un bol de nouilles et elle s’est assurée que je mange toute mon assiette avant de superviser ma prise de médicaments. J’ai bu la solution de réhydratation et j’ai fais semblant de prendre les pilules, préférant prendre les miennes, comme je ne connaissais pas les autres.
Pour m’occuper, j’ai joué une bonne partie de la journée au 2048, car il n’y a pas Internet, je n’ai rien à lire et le récit de mes aventures est maintenant à jour. La télévision jouait en sourdine et il y avait plusieurs nouvelles sur les élections de mi-mandat aux États-Unis, avec certains passages en anglais, ce qui attirait mon attention. Sinon, les soaps chinois sont vraiment « stagés » et on dirait qu’ils ont tous les mêmes scénarios poches. Autant en profiter pour faire une sieste!
J’ai soupé de bonne heure, les gargouillements sont encore un peu présents et l’appétit n’est pas au top, mais ça s’en vient. J’ai passé le reste de la soirée sur le bord de la petite chaufferette et j’ai donné une photo de moi au couple du guesthouse en guise de souvenir, ils avaient l’air touché par cette petite attention.
Quelle aventure! Ton aventure me fait beaucoup penser à « Seul à bicyclette de Paris à Saigon » de Lionel Brans. Content de voir que tu es si bien aidée par des gens qui semblent tellement humains!
c’est des choses qui arrivent à l’occasion, j’espère que tu vas récupèrer vite, 700 marches, c’est pas du bonbon, un bel exercise, bonne chance stéphanie.