J’ai eu l’occasion de participer à la première édition de la Classique Jackrabbit, un événement se déroulant entre Mont-Tremblant et Montebello en ski de fond à la fin janvier. Une aventure un peu folle avec quelques 275 autres skieurs, une journée parfaite côté météo et conditions de neige.
La veille j’avais pris le temps de préparer mes skis avec soin avec les produits Vauhti et une petite recette de « kick » que j’avais testé sur les longues distances afin d’avoir de bons skis. J’ai aussi profité de la présence de ma soeur Caroline, nouvellement physiothérapeute pour me faire traiter en prévention avec des tapings aux deux genoux et dans le dos. Je connais mes faiblesses et dans des défis d’ultra distance du genre ça fait vite ressortir les bobos.
Disons que côté préparation j’aurais du faire plus de volume en ski de fond, mais bon j’allais devoir vivre avec mon maigre 80km de ski dans les jambes.
Le départ à la lampe frontale est toujours excitant et bien souvent le meilleur moment de la journée. Je me suis vite rendue compte que je n’étais pas dans une grande journée et passé l’excitation des premiers kilomètres ma motivation était déjà vacillante. Ça m’a pris une bonne vingtaine de kilomètres avant de trouver un certain rythme et une zone de confort.
La Classique Jackrabbit se déroulant en partie dans la région où j’ai grandi, je connaissais de nombreux bénévoles et participants et c’est toujours le fun de revoir des visages familiers et de se faire encourager par son nom. Après 30km, j’étais trop lente pour skier avec ma soeur alors j’étais laissée à moi-même, l’énergie était encore bonne. Ma mère m’attendait au prochain ravito à Arundel et j’en ai profité pour manger et faire le plein de gel Rekarb et de jujubes énergétiques en plus de rajouter une couche de fart de retenue sur mes skis.
J’ai laissé entendre à Pierre, le père d’une de mes amies de ski et un habitué du MCS, qu’on pourrait faire un bout de chemin ensemble comme on semblait avoir la même vitesse. Une décision qui allait, plus tard, s’avérait gagnante et qui nous permis de terminer cette difficile épreuve.
Petit train va loin et les 15km suivants se sont bien déroulés jusqu’à la première traversée d’un lac. Voir l’horizon au loin ça m’a donné un coup de barre surtout qu’il était près de l’heure de dîner, un moment toujours critique pour moi sur les longues distances. Je n’étais pas au bout de mes peines, car à la sortie du lac on a commencé une interminable section de bord de route qui allait nous mener à l’arrivée du 60km et prochain ravito.

Depuis quelques temps déjà, je jonglais dans ma tête avec l’idée de couper court au 60km. Mon manque de préparation me rattrapait cruellement, mon corps commençait à souffrir et je savais que le prochain 40+km était plus difficile sur papier. Dans mon fort intérieur, je savais que j’allais terminer le 100km. Pour me convaincre, je me disais que si je le complètais cette année, je n’aurais plus besoin de le refaire mais si j’ « abandonnais » j’allais devoir me retaper le supplice!
Des pensées négatives du genre, c’est mon lot quotidien l’été au treeplanting. Ça m’a aussi rappelé une journée épique de vélo en Belgique où j’étais dans le même état physique et psychologique.
Bref, après avoir mangé et bu au maximum et surtout fait la razzia de gels Rekarb. Pierre et moi avons fait un pacte de rester ensemble jusqu’à la fin pour maximiser notre réussite.
De retour sur la piste, on reprend où on a laissé c’est-à-dire en bordure de route et ça monte. Après 400m, je doute de ma décision de poursuivre. Je continue d’avancer quand même, pas question de revirer de bord. Mon orgueil est trop fort.

La piste devient étroite et rock’n’roll, à un endroit on doit même enlever les skis pour descendre une section. D’habitude après les ravitos, j’ai un regain d’énergie, mais là j’ai un léger mal de coeur et je me questionne à savoir comment je vais faire pour skier encore 35km. On traverse un autre lac et je m’arrête pour manger et boire un peu, les derniers km ont été éprouvants et j’ai hâte d’avoir mon second souffle. On repart de plus belle, mon énergie revient peu à peu. Le parcours nous garde en alerte avec une série de virages et quelques descentes techniques, mes jambes sont chambranlantes et j’évite à plusieurs reprises de faire un face à face avec un arbre.
On est vraiment au milieu de nulle part, c’est là que l’on réalise la grandeur du Québec. On continue d’avancer, toujours moins vite, mais on se rapproche tranquillement de Montebello. Chaque pancarte indiquant le nombre de kilomètres parcourus est source de réjouissance pour quelques secondes. Pierre et moi sommes toujours ensemble, à certains moments je parle beaucoup pour essayer de déjouer mon mental et oublier la distance à faire alors qu’un peu plus loin on skie côte à côte au son des skis sur la neige partageant cette souffrance.
Au km 78, nous sommes bien contents de voir un mini-ravito d’échanger avec les merveilleux bénévoles qui nous mentionnent que les prochains kilomètres devraient être principalement en descente. Avec mon expérience, je sais que les descentes ne durent jamais bien longtemps comparé aux montées.
On est sur un long, très long chemin forestier qui n’en fini plus de finir. Je commence à être tannée de skier, mais pas le choix je continue de glisser ou plutôt marcher rendue là. Les kilomètres défilent lentement, mais l’énergie est stable et je n’ai pas trop mal au corps ou du moins c’est un mal égal!
Je serais dû pour rajouter une couche de fart de retenue sous mes skis, mais je n’en ai pas la force ni l’envie. Je suis donc bien heureuse qu’un bénévole au km 88 m’offre ce petit service pour entamer la dernière ligne droite de cette longue journée.

On a rejoint l’une des sections du Marathon canadien de ski et j’ai quelques souvenirs ici et là du trajet. La noirceur commence à s’installer, mais on continue sans sortir la lampe frontale, on a hâte d’arriver! On approche de la fin et à la vue du viaduc de Montebello, je sais qu’à partir de là ça descend jusqu’à la fin pour vrai et qu’on va avoir réussi notre défi.
Très contente d’enfin franchir la ligne d’arrivée après une exténuante journée sur les skis. Pas trop souvent des défis du genre et même plus jamais que je me suis répété à plusieurs reprises au cours de la journée en sachant très bien que le MCS est dans 3 semaines!
Aucune douleur majeure, mes psoas sont douloureux, mes genoux sensibles et mon dos tendu, mais grâce aux bons soins de ma physio tout est rentré dans l’ordre. Ma récupération a été rapide et j’ai senti que ce volume a ski a vraiment monter mon niveau de forme d’une coche. Il y a ça de positif pour le MCS. 104km en une journée c’est très taxant sur le coup, mais au final beaucoup moins que 160km en deux jours.
Très intéressant compte-rendu! Quelques amis de la TDL ont aussi fait cette longue randonnée, tout juste une semaine avant la Traverése des Laurentides! Disons qu’à la TDL cette année, on y a gouté d’aplomb! 2,5 jours sur des conditions croutées / glacées rendant la plupart des descentes ou casse-cou ou tout simplement impraticables … Mais la dernière journée par les crêtes de Tremblant a été vraiment très belle!
Merci encore pour le compte-rendu!
Merci! La TDL est dans ma mire pour l’an prochain!