Marathon Canadien de Ski 2016, un objectif inachevé

Il y a toujours mille et une histoires à raconter lors du Marathon Canadien de Ski et cette année c’était d’autant plus vrai. Je vous parle de mon expérience qui malheureusement ne s’est pas terminée comme je l’aurais souhaité avec un abandon. L’échec nous rend plus fort dit un adage et comme journaliste, il donne certainement beaucoup de matière pour écrire!

C’était ma troisième expérience au MCS et mon objectif était de compléter le Coureur des bois Or. Ma préparation était loin d’être optimale, j’ai eu beaucoup de temps pour m’entraîner, mais l’envie n’y était pas de sortir skier et enchaîner les longues heures. J’ai commencé à faire partie de l’équipe de patrouilleurs en ski alpin à Tremblant cet hiver et j’ai vraiment eu la piquûre. Renouer avec mon premier sport de glisse, le ski alpin, faire du back-country, c’est ce que j’avais le goût de faire. J’ai aussi commencé à faire de la boxe deux fois semaine pour le plaisir parce que depuis des années j’avais envie de m’y mettre. J’avais donc une bonne base de forme physique, mais la motivation ne s’achète pas encore!

Ceci étant dit, j’étais inscrite au MCS et j’allais tout faire pour réussir. Le vendredi matin, j’ai préparé et pesé mon sac (un peu plus de 22lbs) avec toute ma nourriture, des vêtements de rechange et mon sac de couchage pour le week-end, j’ai aussi préparé avec soin la glisse de mes skis. J’ai pris la route vers Lachute pour y laisser mon auto et ma mère m’a rejointe pour me conduire à Buckingham au dortoir Or où j’allais passer la nuit.

Normalement, je suis toujours un peu excitée et nerveuse, mais pas cette année. Je sentais que le calvaire s’en venait. Une prémonition? Peut-être. Je me suis installée dans le gymnase, après avoir consulté pour une énième fois la météo, j’ai choisi de mettre 4 couches de VR45 sous mes skis en me croisant les doigts pour que ça fonctionne le lendemain matin.

Jour 1

J’ai dormi comme un bébé jusqu’à 3h45 avant de me faire réveiller par la frénésie des autres skieurs qui se préparaient. J’ai avalé mon déjeuner en vitesse, l’appétit était ok et je suis allée mettre le nez dehors pour voir si la neige avait neigé. Un bon 15cm de neige fraîche au sol et ce n’était pas fini. Ça aurait été des conditions le fun pour le ski alpin, mais ça tournait plus au cauchemar avec la température de zéro degré et 160km de ski de fond au menu.

Un peu plus tard, j’ai pris le premier autobus pour le départ avec j’ai fait la connaissance avec plusieurs autres skieurs, des vétérans du MCS pour ne pas dire des légendes. Ça m’a inspirée et j’ai arrêté de chialer dans ma tête, j’allais au moins me donner la chance d’être dans un état d’esprit positif.

Juste avant le départ, j’ai fait un aller-retour sur le parcours pour tester mes skis, le kick était limite, mais au moins ça ne collait pas et la glisse était plutôt bonne. J’ai reconnu quelques visages familiers, j’ai fait mon petit signe de croix (un rituel depuis toujours, bien que je ne sois pas croyante) et le signal de départ a été donné avec des feux d’artifice après quelques minutes de retard.


Comme toujours, il y a beaucoup de monde et un entonnoir se forme rapidement. J’étais bien positionnée et j’ai pu trouver mon rythme assez rapidement. La piste était très très molle et très vite il n’y avait qu’une seule trace de praticable, mes skis fonctionnaient étonnamment bien dans les circonstances alors que plusieurs skieurs étaient contraints d’arrêter pour gratter le surplus de neige. Les petites montées étaient tout un exercice, j’avais l’impression d’être un hamster dans une cage qui court sans avancer. J’ai été surprise et sidérée quand j’ai vu la pancarte du km2, wow je croyais être rendue beaucoup plus loin! La journée s’annonçait pour être longue et éreintante. J’ai terminé la section sur les bras, car pour les 4 derniers kilomètres mon kick ne marchait plus. J’ai lancé quelques jurons bien sentis de frustration et avec un autre skieur on a choisi d’en rire d’être déjà dans le rouge lors de la première section, réputée facile en plus!

Je suis tombée face première au bas d’une descente environ 10km après le départ et mon immense sac m’a frappée l’arrière de la tête. J’ai été sonnée sur le coup, mais je me suis vite relevée pour ne pas me faire rentrer dedans. Une fois la neige secouée j’ai évalué mon état et je n’avais aucun symptôme de commotion cérébrale. Quel soulagement d’enfin arriver au point de contrôle! Je me suis tout de suite dirigée vers la tente de fartage pour me faire rajouter du fart de retenue rouge spécial. J’ai mangé et bu pour reprendre des forces avant de remettre les skis et d’attaquer la prochaine section. J’ai enfilé mon long imperméable afin de tenter de rester au sec le plus longtemps possible avec toute cette pluie qui tombait parfois assez fort.

Mes skis allaient déjà beaucoup mieux, la piste était déjà un peu moins molle. C’était moins difficile d’avancer, moins taxant pour les bras et les kilomètres s’enchaînaient à un rythme plus normal. J’étais très contente d’arriver au deuxième point de contrôle avec 3h30 d’effort pour un maigre 25km! Retouche de fartage aux skis et le plein de bouffe pour avoir l’énergie nécessaire pour franchir la prochaine section un peu plus technique.

Alors que je me dirigeais pour faire scanner mon dossard la section venait tout juste d’être fermée, j’étais même pas 2 minutes trop tard. Après plusieurs longues minutes d’attente, on a appris que le BR qui traçait était coincé sur la piste et qu’un ski-doo était pris dans un ruisseau. La journée déjà riche en émotions allait prendre une autre tournure. La décision a finalement été prise, les skieurs qui désiraient poursuivre leur journée devaient passer à la section suivante avec un transfert en autobus. Une telle logistique n’était évidemment pas prévue et il a fallu s’armer de patience et attendre sous la pluie froide d’avoir une place dans un des autobus. À ce moment-là, j’étais en bonne compagnie avec Pierre et André, le moral était encore bon, j’avais pu mettre mon gros manteau chaud sous mon imperméable et j’étais somme toute confortable. D’habitude mes jambes ont tendance à « jammer » si je m’arrête trop longtemps aux points de contrôle, mais comme mon kick était limite tout l’avant-midi ce sont mes bras qui ont encaissé l’effort et la longue attente n’a été trop dommageable sur mon corps.

Cette pause forcée a bien sûr cassé mon rythme et bouleversé la hierarchie des skieurs. Quand je suis repartie, il y avait beaucoup de monde sur la piste, au début je trouvais ça motivant, mais au bout d’un moment ça a commencé à me peser de devoir dépasser plein de monde. Cette longue section de 20km a bien été, mais j’avais hâte d’arriver au ravito dans les derniers kilomètres.


Luc de chez Espresso Sports a pris soin de mes skis pendant que j’allais faire la file pour manger. J’ai rencontré pour la première fois Simon Diotte, le rédacteur en chef de la revue Oxygène pour laquelle je collabore depuis 2 ans. J’ai fait un bout de chemin avec lui et une autre portion de la section avec André. J’étais bien contente d’arriver à Montebello, mes pieds me faisaient souffrir, j’étais transie et j’avais hâte de découvrir le camp Or. La dernière montée pour arriver à été pénible.

Je me suis jointe à un petit groupe autour d’un feu, incluant André, mon voisin de dortoir de l’année passée et quelques habitués de la TDL. Je me suis fait « livrer » mes deux balles de foin et je me suis mise au sec le plus rapidement possible. Ça a tellement fait du bien d’enfin enlever mes bottes mouillées et de faire respirer mes pieds. On a été chanceux, la pluie a fait une pause pendant la soirée, nous permettant ainsi de manger et de s’installer au sec. L’ambiance est vraiment le fun et je me compte chanceuse d’avoir pu vivre ça. J’ai défait et étalé une balle de foin et installé mon matelas. Pas très longtemps après que je sois rentrée dans mon sac de couchage la pluie a repris de plus belle. Décidemment, la nuit s’annonçait mouillée! J’ai mis une couverture de secours imperméable par-dessus mon sac de couchage en espérant que ce soit assez pour me tenir au sec.

Jour 2

Je me suis réveillée vers 4h15 après une nuit de sommeil un peu mouvementée, mais j’étais encore au sec. Dans les circonstances, j’ai quand même bien dormi et bien que je sentais les efforts de la veille mon état physique était ok. Déjeuner autour du feu, refaire mon sac et mettre une couche de klister sur mes skis étaient sur le programme avant de reprendre le départ en direction de Lachute.
La piste était en super condition, une petite neige tombait ce qui faisait que mes skis collaient un peu trop et que je devais être vigilante. Les premiers kilomètres ont bien été si ce n’est qu’à chaque descente j’avais peur de tomber car mes skis collaient sans avertissement et qu’avec un sac à dos de plus de 20lbs sur le dos les manoeuvres pour se rééquilibrer deviennent périlleuses. J’ai réussi à rester debout et j’ai même réussi à éviter un autre skieur tombé devant moi, que d’émotions en ce début de journée.

Je savais que la journée allait être difficile et que je n’aurais pas trop de temps d’extra pour faire le « cut-off », mais petit train va loin, un kilomètre à la fois, une section à la fois. Ça c’était avant que je me mette à saigner du nez soudainement une dizaine de kilomètres après le départ du camp Or. Je n’ai que très rarement des saignements de nez, en fait je ne me souviens pas de la dernière fois. Il m’a fallu près de 15 minutes avant que mon nez n’arrête de couler. Je me sentais assez bien physiquement et mentalement jusque là, mais cette pause forcée a donné le coup de grâce à mon moral. J’ai continué à skier, les skis ne marchaient plus aussi bien, le coeur n’y était plus et tous les skieurs qui m’avaient dépassée rendaient la piste achalandée.

Au petit ravito de l’armée, j’ai croisé Fred Ménard, l’organisateur en chef, et on a pris une photo plutôt comique ensemble. Je me suis tranquillement fait à l’idée que c’était les derniers kilomètres de mon MCS 2016. Je n’ai pas souvent eu à abandonner dans ma vie et ce n’est jamais une décision facile à prendre. Le ski de fond est supposé être un sport que j’adore et que j’ai du plaisir à pratiquer depuis des années, mais là c’était tout le contraire. À la pancarte indiquant 2km du premier point de contrôle, ma décision était prise, j’allais mettre le « flasher » et arrêter le Marathon avant d’avoir une écoeurantite aigue du ski de fond et ne plus jamais vouloir remettre les skis. J’avais aussi un mal de cou assez intense du à ma chute face première d’hier matin durant laquelle mon immense sac m’a frappée à l’arrière de la tête.


J’avais les larmes aux yeux durant les derniers kilomètres, déçue de moi-même, fatiguée et tannée, en même temps, un peu soulagée aussi. À un moment donné, j’ai tellement puisé dans ma « réserve d’orgueil » cet hiver que celle-ci était à sec. Je n’avais pas trop envie d’affronter le regard des autres, même si tout le monde a été respectueux et m’a encouragée. Pas facile d’accepter d’être « battue » même si c’était une année difficile, mais bon c’est la vie et je vais m’en remettre bien assez vite!

Après avoir attendu la navette pour quitter le point de contrôle en vue de rallier Lachute, j’ai commencé un périple en autobus de près de 4 heures avec plusieurs transferts pour finalement pouvoir prendre une douche et me mettre au sec.

Ce trajet en autobus m’a permis de découvrir le MCS version randonneurs. Une option où les skieurs choisissent de faire le nombre de sections qu’ils désirent pour le plaisir en famille ou entre amis. Un choix beaucoup plus relax que la version Coureur des bois. Ça m’a redonné un peu le sourire de voir des jeunes enfants avec leurs parents tout excités de faire la dernière section, de profiter de l’ambiance au point de contrôle, etc. Ça m’a ramenée à la base et mis en perspective ma propre expérience et mes attentes.

N’empêche que dimanche après-midi, en regardant les skieurs et particulièrement les Coureurs des bois traverser la ligne d’arrivée j’ai vraiment eu le syndrôme de l’imposteur. Ils étaient là beaux, fatigués, vidés, mais avec la satisfaction d’avoir réussi, alors que moi j’avais la grosse boule d’émotion et de déception d’avoir échoué.

Ce n’est que partie remise pour une prochaine édition afin d’accomplir mon Coureur des bois Or. D’ici là, je vais laisser mes skis de fond de côté, soigner mon cou (j’ai subi un whiplash lors de ma chute) et refaire le plein de motivation.

Un immense merci à Frédéric Ménard et toute son équipe, aux bénévoles très dévoués partout sur la piste. Tout était parfait sauf la météo!

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